mercredi 10 avril 2024

Stoïque 10 avril

 “Desert rose” ne m’a pas raté ce matin. Je me suis retenu pendant que j’avais une passagère avec moi. Elle est descendue. La voix de Sting est restée. Et là, j’ai mouillé même ma cravate pendant que je traversais cette Ottawa ensoleillée. Mais avant d’arriver au parking sous-terrain du bureau, j’ai laissé Mary J. Bridge prendre la place à mes tympans dans “Family affair”. Je ne peux pas revenir et effacer les souvenirs des 8 précédents 10 avril, celui-ci, je peux décider d’en faire un nouveau qui sera agréable à revivre l’année prochaine. Je me suis heureusement rappelé que je pouvais être stoïque. 


Le premier 10 avril, j’étais à Vegas. Il y avait plein de promesses: amour, fidélité, soutien mutuel… C’est là que tout a commencé. Le deuxième à Haïku, à l’Hôtel Royal Oasis, à Pétion-Ville…, un super beau moment… Le quatrième, solitaire, mais satisfait, devant plusieurs Prestige fraîches et des olives vertes épicées à Station 73, à Delmas. Le 6e, sur le sable chaud d'une plage à Las Terrenas, en République Dominicaine... Le 8e dans un sous-sol, à Orléans, au Canada, essayant de récoler des morceaux cassés qui ne pouvaient absolument pas se recoller, ça je ne l’ai réalisé qu’entre le 13 et le 20 juillet 2023.


Le 9e là, je vais envoyer un courriel responsif, je serai facturé pour la réception, la reformulation et le transfert à qui de droit. C’est le premier 10 avril où je me fais une dette pour avoir envoyé un courriel. Mais je comprends et accepte que tout a un prix. Je paierai pour ce courriel pour ne plus être lié aux désormais, funestes souvenirs du 10 avril. 


Toujours se focaliser que sur ce que l’on peut contrôler. Et non l'inverse. Quand on réalise cela, on est stoïque. 




Gaspard DORÉLIEN 

Ottawa

10.04.24

10:24

samedi 6 avril 2024

Danser à minuit sous zéro degré

C’était du compas. J’ai reconnu les pas. Elle portait un manteau rose et un jean bleu. Et lui, un veston en cuir couleur marron. Il était minuit passé de trois minutes. J’ai été témoin de la plus mignonne scène romantique que le Canada m’ait jamais offerte.


Sur le Chemin de la Côte Sainte-Catherine, à Montréal, il faisait 3 degrés avec un ressenti de zéro degré, pourtant un jeune homme et une jeune fille semblaient vouloir arrêter le temps et défier la température, briser les codes de la normalité; vivre et profiter de l’instant présent; exprimer la gratitude d’être ensemble; profiter d’un instant de bonheur que les interdits ne sauraient leur ôter et penser en dehors de la boîte.

 Ils dansaient devant un complexe d’appartements en ignorant les voitures qui passaient; moi qui me suis arrêté pour les observer; les petites vieilles qui pourraient les épier à partir de leurs fenêtres; les conformistes qui pourraient les juger ou les envieux qui pourraient les maudire.

Ils se souriaient, se prenaient par la main, tournoyaient, "plogueaient"… Ils étaient tout ce que les autres s’interdiraient ou jugeraient ridicule. Ils dansaient, s’épousaient, faisaient parler leurs corps qui se comprimaient et s’écartaient alternativement.

C’était leur moment, leur musique, leur danse, leur jouissance et leur connivence.

 La danse s’arrêta, le cavalier déposa furtivement un bref baiser sur le front de sa coéquipière. Ils s’étreignirent, échangèrent des mots que je ne devinerais jamais. Elle entra toute seule, le jeune homme regagna son véhicule garé dans l’allée dont les portes avant étaient restées ouvertes. La musique qu'ils dansaient se jouait probablement dans la voiture. Je n'étais pas assez prêt pour confirmer. Il démarra rapidement, comme si, d'un coup, il reprenait conscience que le temps, lui, ne s'était pas arrêter le temps de son écriture chorégraphique.

En me dépassant, j’ai reconnu la fin du morceau intitulé “Lasyans” de Medjy du défunt groupe Enposib. Ma musique fétiche depuis novembre de l’année dernière. Dans tous les cas, “youn te sanble byen renmen lòt, san youn pa sezi”.

Gaspard DORÉLIEN 

Montréal 

07.04.24 

1h11 AM

mardi 26 mars 2024

Authenticité


J’ai gardé le sourire béat sur plus d’un kilomètre. Il m’a fait sourire. De mon lieu d’Haïtien d’avant 1986 qui a été témoin de ce que manifestation veut dire, je ne pouvais ne pas sourire. Après le sourire est venu le temps de la réflexion. Et j’ai vu dans sa solitude de l’authenticité, de la conviction, de la détermination. Ce matin, sur Montréal Road, à Ottawa, du haut de mes 40 ans et poussières, j’ai vu la plus singulière protestation de ma vie. Un homme seul brandissant une pancarte: “No tax carbon”.


Peut-être lui a-t-on dit non. Ou lui a-t-on peut-être posé un lapin. Ou alors sa conviction est tellement forte que la solitude de sa démarche ne l'a pas dissuadé de se faire entendre ou se faire lireIl incarne pour moi l'authenticité. Le courage.

Il ne fait pas dans la surcompensation, contrairement à beaucoup d’entre nous sur les réseaux sociaux, où nous ne montrons que nos succès ou prétendons posséder des qualités que nous n'avons pas, des convictions que nous n'adoptons même pas, une guérison que nous ne connaissons pas, un bien-être que nous n'expérimentons pas. Cet homme doit être conscient que des causes plus médiatisées n’ont pas toujours abouti, mais cela ne l’a pas découragé.

Je suis resté une minute entière à l’observer. Il à commencé à parler, mais avec une forte énergie, à un sexagénaire sur une chaise roulante électrique. Ce dernier a servi d’éponge à ce singulier protestataire.Je me demande s'il a considéré la faible probabilité que son auditeur, étant donné sa situation, puisse se rallier à sa cause. Mais jamais sa main droite qui portait la pancarte n’a été baissée.

Gaspard DORÉLIEN
Ottawa
26.03.24
13:13

vendredi 22 mars 2024

Dormir, rêver et rêver !

 

Dans mes rêves, je reste très rarement au Canada. Je m’envole toujours vers des contrées pour vivre ce que mon subconscient cache ou ce que mon conscient convoite. Hier soir, ou peut-être ce matin, durant de longs instants, je suis retourné en Haïti. J’ai redécouvert la mer, Miss AnayizZ, Mirebalais, des gens que j’aime et d’autres que j’ai aimé. C’était beau! C’était vrai! Je donnerais beaucoup pour que ça dure longtemps. Très longtemps. 

À mon réveil, tard, bien tard ce matin, j’étais bouleversé. Non que je désapprouve la réalité de mon nouveau monde, mais les sensations éprouvées dans le rêve étaient douces, authentiques et profondes. J’ai revu ma terre natale dans des moments de loin meilleurs que ceux d’aujourd’hui. J’ai renoué avec des personnes qui me sont chères, vécu des moments d’une qualité exceptionnelle. 

Des têtes toxiques ont aussi traversé cette parenthèse enchantée. Leur présence, toutefois, pâlissait face à la lumière des belles âmes qui animaient mon rêve.

Au-delà des livres, je suis convaincu que pouvoir rêver et se souvenir des détails constitue la plus belle échappée, permettant de savourer ou de resavourer le bonheur d’ailleurs. Comme j’aimerais retrouver Haïti avec cette même sérénité qui m’a envahi dans le rêve de ce matin. Retrouver ces belles personnes qui étaient sincères et qui le demeurent jusqu’à ce jour !

Ottawa
22.03.24
12h12

mardi 19 mars 2024

La bombe est dans l'avion

 Tout le monde périra, mais tous semblent n'en avoir pas conscience. Une bombe dans la classe économique soufflera tout l'avion, y compris la classe affaires. En Haïti, les élites ont toujours cru que les maux de Cité Soleil n'atteindraient jamais leurs collines. Et, fort de cette croyance, tous ont laissé le petit bouton se convertir en plaie béante. En mars 2024, elle se métastase.



C'est un fait indéniable. Quand il y a une répartition injuste de la richesse, ceux qui sont laissés pour compte n'auront, un jour, d'autre choix que de devenir cannibales. 

En 2018, une annonce revenait sans cesse sur mon fil d'actualité Facebook : « Quand les pauvres n'auront plus rien à manger, ils mangeront les riches. » Je vais lire Gérard Mordillat, auteur de “La Tour abolie”, pour mieux comprendre cette prédiction. La première fois que je suis tombé sur cette prophétie, j'ai eu un pincement au cœur. Et ensuite, j'ai fait l'autruche. “On ne laissera jamais les pauvres démunis en Haïti au point de devoir manger les riches pour survivre.” Je savais que je me mentais en raisonnant ainsi. J'avais déjà tous les indicateurs devant moi :
- une exclusion planifiée par la marginalisation de la majorité de la population ;
- une exode rurale croissante ;
- un système éducatif diversifié où les pauvres n'ont souvent pas accès, ou alors seulement aux “écoles borlettes” ;
- des élites économiques non haïtiennes, qui ne réinvestissent ni ne redistribuent les richesses accumulées. Pour eux, Haïti n'est qu'un comptoir commercial ;
- dans la première République noire du monde, la clarté de la peau est source de privilèges ;
- la politique comme voie rapide vers la richesse ;
- la corruption élevée au rang de sport national ;
- une justice orpheline de sa propre essence.


Je pourrais continuer cette liste pendant un jour entier sans l'épuiser. Je ne devrais pas être surpris qu'aujourd'hui, fuir le pays soit la seule solution. Moi-même, j'ai fui depuis le 21 décembre 2019. Mais toujours, les élites ne pensaient pas que les détonations d'armes viendraient perturber leur tranquillité, ni que ceux qui nettoyaient les vitres de leurs SUV viendraient les chasser de leurs villas perchées sur les collines.


Je ne justifie pas la terreur des gangs en Haïti aujourd'hui, mais la situation était prévisible au vu des faits cités plus haut. Elle était inévitable lorsque l'on élit un grivois personnage comme chef de l'État face à une professeure d'université. Elle était inévitable lorsque, pour consolider son pouvoir, on arme ceux à qui on n'avait jamais tendu la main. Elle était inévitable lorsque pour garantir les opérations de son 'business', on arme les anciens cireurs de ses 4X4. Elle était inévitable lorsque la diaspora dissimule des armes de guerre et des minutions dans les réfrigérateurs, les véhicules, les sacs de riz... envoyés en Haïti. Elle était inévitable quand tous ces faits sont l'œuvre exclusivement d'Haïtiens. Nous avons trop aidé les anciens colonialistes, qui ne nous ont jamais pardonné notre audace du 18 mai, du 18 novembre 1803, et de l'insolente journée du 1er janvier 1804. Il est temps que tous comprennent que la bombe est dans l'avion. La seule solution est de conjuguer nos efforts pour la désamorcer, peu importe votre place dans l'avion.

Gaspard DORELIEN, M.A.
Ottawa
19.03.24

vendredi 8 mars 2024

Pause indienne au curry


C'est nous qui avons rompu le silence des lieux avec la musique que j'écoute depuis hier soir : "Coming Home" de Diddy - Dirty Money et la voix envoûtante de Skylar Grey. C'était paisible. Mais dès l'instant où ma collègue et moi avons franchi la porte en verre, l'odeur du curry nous a enveloppés. Notre pause de ce vendredi était incarnée par ce curry, pardon, ce restaurant indien !

Alors que je m'occupais du paiement du parking, un aimable monsieur est venu m'offrir son ticket encore valable pour plus d'une heure. Nous y avons vu un signe bienveillant du destin. Notre pause déjeuner s'annonçait merveilleuse !

Nous n'avions pas prévu de laisser le hasard décider de notre menu pour notre rendez-vous désormais incontournable du vendredi. Depuis notre dernière escapade dans la cuisine marocaine, j'avais opté pour un restaurant libanais situé presque en face du CasaBlanca, dans le marché d'Ottawa, à la rue ByWard en plein coeur de la capitale fédérale. Mais cette adresse de cuisine libanaise étant en pleine rénovation, fort heureusement, à une encablure de là, un petit restaurant indien a brillamment suppléé notre choix initial manqué. Le silence était appréciable, mais le curry était sublime.

J'ai immédiatement prévenu ma collègue que j'opterais pour un plat au curry. Mais je n'avais pas réalisé que tout était imprégné de cette épice que j'affectionne tant. Son arôme était omniprésent dans le lieu, promettant une caresse gustative pour nos palais.

"Qu'est-ce que le curry ?" me demanda ma collègue, à ma grande surprise. J'avais tout simplement oublié que tout le monde n'était pas aussi passionné de cuisine que moi. On peut être un fin gourmet sans nécessairement connaître toutes les cuisines du monde.

Nous avons finalement opté pour le poulet au curry et le poulet au beurre accompagnés du légendaire riz basmati. Ma collègue a été séduite par le poulet au curry. En fait, elle avait déjà savouré cette épice, si caractéristique de la cuisine indienne; c'était simplement le nom qui lui était inconnu. Plusieurs fois, elle a exprimé son admiration pour son plat baignant dans une sauce de lait de coco au curry. 


Ce n'était pas comme au CasaBlanca, notre dernière halte, où nous avions eu l'impression de voyager à Marrakech, au Maroc, avec les sons, les visuels et les saveurs de ce pays africain. Ici, dans ce restaurant d'authentique cuisine indienne, nous étions charmés uniquement par l'arôme exquis du curry et un repas qui a grandement satisfait nos estomacs.

En partant, nous avons repéré une enseigne italienne dans les environs. Nous n'avons rien promis encore, mais il se pourrait bien que nous nous laissions tenter par la basilique et les tomates le week-end prochain !




08.03.24
19:19

Tout a changé...



Ce n’est plus le même décor. Des textures et couleurs inédites, des visages encore jamais croisés, de nouveaux arrêts... s'inscrivent désormais dans mon trajet vers le bureau. J'ai lancé ma playlist dans l'espoir de retrouver un semblant de routine. Pourtant, même la musique m'atteint différemment. L'autoroute 417 et l'avenue King Edward s'effacent de mon horizon. Je change de zone et tout se transforme autour de moi. Même mes sempiternelles émotions matinales ne sont plus les mêmes.

C'est le contexte qui altère ma perception, et non l'inverse. Me voilà immergé dans le tintamarre du centre-ville d'Ottawa, avec ses enseignes cosmopolites, ses passants pressés, ses badauds, ses marginaux, ses stridentes sirènes, et ses gratte-ciels à perte de vue. La rapidité et le silence de l'autoroute 417 me manqueront, encore et toujours.

Aujourd'hui, j'apprends à redécouvrir chaque édifice, chaque nom de rue, chaque café, chaque boutique ou hôtel dans lesquels je n'entrerai probablement jamais. Ici, je ne suis pas un touriste. J'y habite. C'est depuis peu mon chez moi aussi. J'y ai planté des rêves. Désassemblés. Transformés. Sauvés. Recréés. Je les fais grandir au rythme constant du changement.

Les rêves ne devraient être limités par aucune nationalité, aucun territoire, aucun quartier, aucune demeure. Les miens, je les conserve libres. Même si tout autour de moi a changé.

Gaspard Dorélien, MA
Ottawa
08.03.24
11:11

mardi 27 février 2024

Ce que l’amour n’est pas…

 Il est loin d’être l’histoire de Roméo et Juliette. Il n’est pas ce refuge où nos besoins seront comblés.  Ce n’est le complément des fragments manquants de notre être. Il ne se réduit pas à une salle d'attente de nos espérances. La littérature, le cinéma, la musique… nous ont souvent présenté l'amour comme un abri sous lequel trouver le bonheur. Je vous le dis, en vérité, l’amour n’est absolument rien de tout cela. Souffrez, en lisant les lignes qui suivent, que la bulle illusoire s’éclate.



Nous avons tous grandi avec des blessures que l’on porte dans notre âme, dans notre coeur et que nous reflétons dans nos comportements vis-à-vis des autres. Ces blessures, qu’on arrive difficilement à refermer, créent des êtres incomplets, révoltés, dépendants, haineux, méfiants, manipulateurs, tristes… et inévitablement malheureux et qui souvent rendent les autres encore plus malheureux. L’amour n’est pas un réparateur d’enfance malheureuse. L’amour n’est pas un pansement à nos blessures. L’amour ne recolle pas les morceaux d’un coeur qu’on a donné en pâture à un/une pervers (e) narcissique.  


Nous espérons tous que l'amour viendra combler nos vides, guérir nos blessures de rejet, d'abandon, d'humiliation, d'injustice et de trahison. Pourtant, nous nous trompons. Jamais l’autre ne remplira ces cases vides. Jamais l’autre ne devinera ces attentes - et même si elles sont sues, même avec toute la volonté du monde il/elle ne réussira pas à les satisfaire - et s’atteler à nous combler. L'amour ne repose pas sur l'autre pour trouver paix et harmonie. Ce n’est pas là, la fonction de l’amour. Entrer incomplet dans une relation en espérant en ressortir comblé est une illusion. Il n’en sera jamais autrement.


Cette réalité peut être dure à accepter. Lorsque Shakespeare nous donne Roméo et Juliette, et que notre culture célèbre cette histoire comme l'archétype de l'amour véritable, il est facile de croire que l'autre est notre sauveur ou quand l’autre s’en va, on croit que la vie n’a plus de sens et ne mérite plus d’être vécu. Quand les “plus belles chansons” nous disent que l’autre est le soleil de nos jours, la lune de nos nuits, notre plus beau rêve… notre raison de vivre… et que les “plus belles histoires” qu’on nous vende nous présente des personnages qui s’oublient pour l’autre parce que sans lui/elle nous sommes incomplets (tes), c’est normal que l’on croit aujourd’hui, l’amour, c’est l’autre. Le bonheur, c’est l’autre. L’avenir, c’est l’autre. Et que sans lui/elle la vie est une bière sans alcool. Du gateau sans sucre. Une musique muette. 


Devinez quoi? L'amour ne se trouve pas dans l'autre. Il ne commence pas avec ce regard aguicheur et insistant, un dernier vendredi de janvier. Non plus en contemplant un sourire café au lait sur une photo qu’on a prise un premier dimanche de février à l’église. Ne faites pas attention aux deux dernières phrases. Ce ne sont que des exemples. Fictifs. 


L'amour naît en nous. Il est intrinsèque et s'épanouit de l'intérieur. Pour aimer autrui, il est essentiel de s'aimer soi-même.


Beaucoup d’entre nous qui disons être des disciples du Christ et attendons le secours du bonheur de l’autre, ne comprenons pas un de ses plus importants préceptes: “aime l’autre comme toi-même”. Les premises de cette recommandation soulignent que pour donner de l’amour, il faut l’avoir déjà expérimenté avec soi-même. Jésus par cette parole nous dit indirectement que l’on doit s’aimer d’abord. Qu’il est normal de s’aimer. Que l’apprentissage de l’amour commence avec soi-même. S'aimer n'est pas égoïste, c'est le fondement même de l'amour véritable. On ne peut pas aimer l’autre si on ne s’aime pas soi-même. 


Bon là, Jésus n’a rien pipé sur les milliards de raisons qui peuvent nous empêcher de nous aimer d’abord. Mais dans leurs gênes, l’homme et la femme avaient heureusement cette faculté qu’on appelle intelligence. Cette dernière nous a permis au fil des millénaires, de comprendre, d’analyser et même de prévoir nos schémas de comportement. Saviez-vous qu’un enfant non désiré ou abandonné par son père, en embryon étant, connait déjà le rejet et l’abandon? Saviez-vous que telles blessures, si elles ne sont pas colmatées par un amour inconditionnel de son plus proche entourage feront de lui ou d’elle un être qui va très mal “dealer” avec l’amour? Ce n’est q’un  exemple parmi tant d’autres.


Devenu (e) adulte, celui ou celle qui n’a jamais été conscient (e) de ces déchirures comptera toujours sur les autres pour le guérir ou fera subir aux autres les maux qui érodent son être. Il/elle deviendra un ou une dépendant (e) affectif (ve) ou un/une pervers(e) narcissique. La première pathologie a plus de chance d’être circonscrite si elle est identifiée et que la personne qui en souffre trouve de l’accompagnement auprès de professionnels de la santé mentale. Quant à la seconde, les possibilités de guérison sont infiniment minces. Un/une perverse narcissique c’est comme un vampire qui ne vit que de sang. Celui-ci ou celle-ci vit pour faire souffrir l’autre et est dépourvu de toute empathie. Il/elle manipule, minimise, développe une dépendance chez l’autre par rapport à lui/elle… Mais tout ceci c’est pour combler son insécurité viscérale. 


Sans cette auto-acceptation, nous devenons soit des victimes, soit des bourreaux, incapables d'aimer authentiquement et développant des dépendances. Les attentes inassouvies mènent à la souffrance. La seule voie de sortie est de chercher de l'aide, car seul, le chemin vers la guérison est semé d'embûches. Ce processus de guérison de l'enfant intérieur blessé, d'acceptation de soi, de pardon et d'amour propre est essentiel pour vivre en harmonie avec soi-même et être prêt à aimer véritablement.


Il sera quasiment impossible de s’en sortir tout seul. Avec toute la volonté du monde, vous commencerez le changement. Mais les émotions, les manques, les besoins, les habitudes… disparaitront de temps en temps. Mais ils réapparaîtront plus forts qu’avant. Il y a tout un processus par lequel vous devez passer pour guérir l’enfant blessé qu’il y a au dedans de vous, pour vous accepter dans votre imperfection, vous pardonner et finalement vous aimer, suffire à vous même, vivre avec vous même, être bien avec vous même et finalement être heureux avec vous même. Ce n’est qu’à ce moment que vous serez prêt (e) à donner et à recevoir de l’amour. Vous n’aurez pas d’attentes à combler, vous n’aurez pas d’incomplétudes et votre bien-être ne dépendra pas de l’autre. Et toute relation devient un complément, non une nécessité à votre bonheur.


Quand vous vous aimez, vous n’accepterez plus de comportement toxique, contrôleur, manipulateur de l’autre. Et vous ne resterez pas dans une relation destructrice, espérant vainement combler un vide affectif. Quand vous vous aimez comme il faut, vous ne bâtirez pas de relation où l’autre sera votre souffre-douleur parce que croyez que la souffrance de l’autre apaisera la vôtre.


Si l’autre pour une raison quelconque décide de quitter le navire, vous serez pas perdu parce que vous étiez déjà complet sans lui ou sans elle. Et vous aurez appris des choses de cette expérience qui renforceront votre personne.


Mais diriez-vous que tout ceci est bien beau et facile à dire. Mais comment arriver à cette auto-suffisance, à cet amour de soi, à cette confiance en soi, à cette complétude? Bien que le processus peut être long et ardu, mais la solution est toute simple: elle est dans l'aide professionnelle d'un thérapeute ou d'un coach de vie certifié. Je rivens de loin. Et je  suis aujourd’hui loin, très loin de là où j’étais il y a peu. Et j’ai appris que l’amour n’est pas l’autre. L’amour est d’abord soi. Je ne parle pas ici de ce nombrilisme arrogant et contre productif. Je parle de cette prise de conscience pour comprendre que vous méritez le meilleur et le meilleur pour soi vient de soi-même, une responsabilité qui nous incombe entièrement.


Gaspard DORÉLIEN, MA


OTTAWA

27.02.24

16h16

vendredi 23 février 2024

L’équilibre marocain, ce midi

 Ce vendredi, j'ai visité le Maroc tout en restant à Ottawa. C'est l'avantage d'habiter dans une ville cosmopolite : on peut parcourir le monde sans se déplacer. À "Casablanca", un petit restaurant situé dans le marché d'Ottawa, en plein centre-ville, j'ai découvert toute la richesse de la cuisine marocaine. Petit récit.


Ma collègue et moi avions décidé de laisser le hasard choisir notre découverte culinaire du midi. Arrivés à la rue ByWard, non loin de la Librairie du Soleil (mon nouvel endroit préféré à Ottawa), j'ai d'abord proposé des sushis. Mais ce n'était pas de son goût, n'ayant jamais essayé et ne souhaitant pas le faire aujourd'hui. J'hésitais alors entre un restaurant libanais et un autre spécialisé en “noodles”.

Le nom “Le Casablanca”, jouxtant l'entrée du marché, a attiré mon attention. Faisant confiance à mon intuition pour dénicher de bons restaurants dans la capitale fédérale, ma collègue m'a suivi sans hésiter. Nous ne savions pas encore que nous étions partis pour un inoubliable voyage culinaire au Maroc, dans l'authentique cuisine du pays d'origine de l'excellent comédien Rachid Badouri.

Bien que différent du cadre chic et luxueux 1 Elgin du CNA, le décor du restaurant m'a plu. La nourriture, déjà prête, était soigneusement exposée dans une vitrine. Le choix était difficile tant les plats semblaient appétissants. L'hôtesse nous a proposé un combo pour deux, incluant toutes les viandes et accompagnements.

L'agneau était tendre, épicé avec modération. Le riz, teinté au safran, était satisfaisant. J'ai mangé les deux saucisses seul, ma collègue ayant choisi de les éviter. Mais elle ne savait pas ce qu'elle manquait. Elles étaient délicieuses. Le couscous et la pomme de terre rôtie étaient agréables, tandis que la carotte, le chou, le chou-fleur et les pois chiches complétaient ce généreux plat qui nous a pleinement rassasiés.

Nous avons conclu ce repas gargantuesque avec du thé marocain : de la menthe fraîche infusée, sucrée au sirop de miel à ma demande, servie dans des petits verres transparents. On nous a donné toute la théière, permettant à chacun de nous de savourer plusieurs verres de cette délicieuse boisson chaude.

Les deux clients à la table d'en face sont partis, et un fin bâtonnet parfumé a été placé sur leur table. L'odeur me rappelait celle de l'encens, mais moins forte et moins agressive pour l'odorat. N'ayant jamais visité le Maroc, j'imagine que l'ambiance dans un restaurant typique là-bas ne doit pas être très différente, surtout avec une radio diffusant en continu une conversation dans une langue étrangère. J'ai demandé à notre serveuse souriante de confirmer : c'était bien une radio marocaine, et la langue que j'entendais était le “Darija”. Elle m'a épelé DAGRIA, un détail qui a piqué ma curiosité de francophone, me demandant comment DAGRIA pouvait se prononcer DARIJA. L'ethnocentrisme, quand tu nous tiens !

Ma collègue m'a couvert de remerciements, estimant avoir exceptionnellement bien mangé et de manière équilibrée. Quant à moi, j'ai trouvé la cuisine particulièrement bien équilibrée : les épices, bien que nombreuses, n'étaient pas agressives et respectaient les saveurs originales des aliments. C'était un mélange pétillant, doux et varié.

Ce fut un vrai bonheur de visiter le Maroc ce vendredi. La rue ByWard est un véritable trésor de restaurants. Notre prochaine aventure culinaire nous mènera quelque part en Orient, mais je n'en dis pas plus. En attendant, le Casablanca à Ottawa vient d'ajouter une raison de plus de visiter un pays où j'airai pour manger. Rien que pour manger!

Gaspard DORÉLIEN, MA

Ottawa,
23.02.24
13:13

mardi 20 février 2024

Que serait la vie sans musique ?

Je me répète encore. Musique sur les routes grises d'Ottawa, émotions fortes, larmes discrètes. Je n'y peux rien. Quand ça me plaît, les larmes ne sont jamais loin. Mais cette fois-ci, mes deux compagnes de route n'ont rien vu. Le ciel grisâtre est devenu bleu. Avec “Desert Rose” de Sting et “Flora's Secret” d'Enya, j'ai comme flotté en conduisant. Une fois de plus, j'aurais été le plus heureux si la vie m'avait quitté à cet instant. Que serait la vie sans ce don divin qu'est la musique ? Vous savez, vous ? J'imagine un tableau morne et mortel !


Huit mois se sont écoulés depuis que je n'y ai pas goûté. Recommandation de mon médecin de famille. Interdiction héritée de la montagne russe qu'ont été mes jours en 2023. Le café, qui ici ne garde pas la promesse de son odeur, m'a appelé ce matin. Je l'ai travesti en y ajoutant deux cuillères à soupe de lait malté (Ovaltine). J'ai presque retrouvé la béatitude connue sur la King Edward ce matin, avec les haut-parleurs qui diffusaient toute la poésie de “Desert Rose” et toute la douceur divine de la voix d'Enya dans “Flora's Secret”.

Un cortège de mots parlant de rêves, de pluie, de désert rose, de fleur du désert, d'intoxication à l'amour, de ciel vide... tout cela dans une orgie entre le violon, la batterie, la guitare... et une vocalisation qui vous donne de doux frissons aux tympans. La musique est la mémoire des souvenirs qui tempèrent ou volcanisent mon cœur. Mes sens entrent en transe quand les paroles se font complices des instruments, épousant des symphonies assimilables à de la magie pure. Je me contiens en présence des autres, comme ce matin. Seuls mes yeux ont trahi mes émotions, humides à souhait. Les mêmes larmes reviennent à chaque écoute. C'est en boucle que j'écoute ces perles, sans jamais me lasser.

Je sais que je blasphème en tentant d'utiliser des mots pour traduire l'effet de la musique sur moi. Ce que je vis avec les sons qui me parlent relève du divin. Je suis à la fois apaisé et bouleversé. Dans ces cas, la vie me paraît insuffisante lorsque j'embrasse une musique. J'aspire à d'autres expériences. C'est pourquoi l'idée de mourir dans cet état me hante.

Si je connaissais l'heure exacte de ma mort, j'aurais sur les oreilles les écouteurs les plus puissants au monde, réglés à un volume capable d'éclater les tympans, avec l'une de mes playlists en mode répétitif. Des musiques qui me rappelleraient ma mère, mon enfance à Thorland, mes journées sans fin au Collège Catherine Flon, mes moments à la Faculté des Sciences Humaines, mes peines d'Haïti à Brooklyn, à Minneapolis, à Paris, à Sheffield... et mes éternels matins gris à Ottawa. Oui, je dois mourir en musique, avec tous mes rêves réalisés et manqués sur le cœur. Tel est mon dernier vœu. Que je meure en musique !

Gaspard DORÉLIEN, MA Ottawa 20.02.24 12h12 PM


jeudi 15 février 2024

Ma meilleure lecture depuis 2024

Je n’ai pas eu à réinventer la roue. J’ai lu le livre en 24 heures et j’ai été comme métamorphosé. J'ai mûri, aimé davantage, pardonné. Et je m’apprête, À l'instar de Camille, la protagoniste principale du roman “Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une”, de Raphaëlle Giordano, à restituer ce que j’ai appris. Pas dans ce compte rendu de lecture. Bien entendu!



Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une est un roman écrit par une femme, pour les femmes. Que les foudres des féministes trop ailées ne me terrassent pas, mais il existe bien une littérature féminine. Avec des sujets éminemment féminins et écrit dans le langage qui ne devrait appâté que les femmes, au regard des construits que la société a forgé pour le deuxième sexe. Mais, définitivement après avoir découvert en 2022  la magie de la littérature “girly” avec Virginie Grimaldie, j'ai décidé de m'affranchir des préjugés masculins et de m'y plonger. Deux catégories de personnes devraient s’y verser: toutes les femmes et les hommes intelligents.


Bien loin d’une histoire faite de paillettes et de prince charmant (que Dieu me préserve de certaines foudres), “Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une”, est un véritable ouvrage de reconstruction de soi, d'atteinte du bonheur, de lâcher-prise, de soulagement par le pardon et du concept de "hâte-toi lentement".


À travers l’histoire d’une femme, Camille, aidée d’un “routinologue”, nommé Claude, on a le loisir de suivre étape par étape comment l’on peut arriver à changer notre routine maladroite, étriquée par toutes les vicissitudes de l’existence, à une vie épanouie dans son couple,  renouer avec son enfant et ressusciter un rêve oublié pour en faire le pivot de sa vie transformée.


C’est un livre avec des dialogues, un poil, clichés, et quelques invraisemblances, mais au bout de la ligne, c’est un merveilleux livre que nous a sorti Raphaëlle Giordano. Une bouffée d’espoir dans l’exigeante et fugace réalité à l’ère de la réussite que tout le monde affiche sur les réseaux sociaux et où tout les monde est bon ou est la victime de l’autre.


Je l’ai lu en 24 heures. En fait, 32 heures pour être précis. Et c’est jusqu’à présent, ma meilleure lecture, mon meilleur investissement de temps en littérature du deuxième sexe depuis le 1e janvier 2024.

Je le recommande vivement. Et vous me ferez savoir si, oui ou non, vous allez, vous aussi restituer aux autres une partie de la nouveauté qui émaille votre vie. Seuls ceux et celles qui arriveront à la fin du 35e chapitre saisiront pleinement ma pensée. Bonne immersion!


Gaspard DORÉLIEN, MA

Ottawa

19h19

15.02.24