mardi 28 février 2023

Pays pilleurs!


La question ne trotte plus dans ma tête, mais elle gambade, elle galope… Comment ce ministre français puisse se sentir vexé parce que dans “Black panther: Wakanda forever” on présente des militaires français comme des pilleurs? Comment une telle figuration ne puisse pas être une évidence pour lui?

Est-il possible qu’un Français qui arrive au rang de ministre puisse oublier ou nier que si l’histoire quotidienne était comptée par des médias neutres et non irrémédiablement occidentaux, on reléguerait la France parmi les tops pays avec ce passé ou même ce présent des pires voleurs et pilleurs de toute l’histoire de l’humanité?

Comment ce ministre puisse oublier ce que la France a fait au Mali, au Congo, au Cameroun… en Haïti

Comment explique-t-il que ces pays puissent parler Français? Ces pays-là l’avaient conviée à venir partager son gaulois à la noix?

Comment peut-il occulter la barbarie sans nom de ses aïeuls qui ont été sur des continents où ils n’avaient rien à faire, réduire des hommes et des femmes en esclaves, s’emparer de leurs richesses, imposer leur Bon Dieu blanc, leur langue, leur coutume sexuelle… et devenir ce pays super riche et vouloir aujourd’hui se vexer après une minuscule étiquette de rappel de peuple pilleur dans un film?

Ignore-t-il que la colonisation est la forme la plus palpable de pillage d’un peuple par un autre? 

Ignore-t-il que piller ne veut pas dire emprunter et encore moins demander?

Peut-il ignorer que l’histoire de la France, si elle était comptée comme il faut, serait jalonnée d’une succession incalculable d’aventures de pillages?

C’est inimaginable comment des êtres humains puissent être autant “rizèz”! 

Si seulement les médias, leur cinéma… véhiculaient la vérité, on saurait que l’Espagne, l’Angleterre, le Portugal, la France sont des pays pilleurs… des pays où, il y a pas un siècle comptaient que des sauvages qui laissaient leurs assiettes pour aller piocher, sans invitation, dans celles d’autres peuples.

Mais aujourd’hui, parce que les pays de ces peuples sont invivables (parce que la France, l’Angleterre, l’Espagne, le Portugal… leur a tout pris), ils crient à l’invasion quand ces populations viennent changer un peu le décor avec leurs visages colorés, maculés de tous les manques.

Quel toupet! Quel audace! Quel “je chèch”!

Honte à vous! Pays pilleur!

Gaspard Dorélien, MA

jeudi 2 février 2023

“Cabaret noir”: collage lumineux pour célébrer notre “sombritude”

 Un brassage hétéroclite où Frantz Fanon, Spike Lee, Dany Laferière, Aimé Césaire, Toni Morrison, Shakespear… se côtoient, se télescopent, se bousculent et s’harmonisent à la fois dans la pénombre et dans la lumière pour assumer la négritude; pour dire haut et tout bas une parole sur cette couleur de peau, assimilée à la mort du soleil. 


“…Parce que nous savons quelque chose que personne d’autre ne sait. Nous naissons bien-meuble, nous vivons nègre nous mourons chien”, écrit Mélanie Demers à la suite de  la mort de Georges Floyd en juin 2020, sous les genoux de Derek Chauvin dans le Midwest de l’auto-proclamé champion de la Liberté et de la démocratie, Les États-Unis d’Amérique. Ce texte a allumé la flamme qui a donné naissance au spectacle “Cabaret noir”. Ce dernier était en représentation au studio Azrieli du National Arts Centre, au coeur de la capitale du Canada, Ottawa, jeudi 2 février. Il est aussi programmé deux jours de suite, à 20h, à la même salle.

Cabaret noir: six acteurs vivants (Vlad Alexis, Florence Blain Mbaye, Paul Chambers, Mélanie Demers, Stacey Désilier, Anglesh Major) selon une mise-en-scène de Mélanie Demers, dans des postures peu conventionnelles, dans des costumes changeant au gré des jeux de lumières qui apparaissent, disparaissent, reparaissent… près de 90 minutes de performances où des extraits d’oeuvres de Frantz Fanon, d’Aimer Césaire, de Toni Morrison, de Dany Laferrière… sont scandés à voix sèches ou raisonnées dans des haut-parleurs invisibles… des chorégraphies, des bouts de spectacles, d’émissions de télévision ou de film sont superposés, collés, racolés, étalés, présentés, chantés, sifflés, susurrés… en français, en anglais et en créole haïtien… devant un public médusé et conquis.


Cabaret noir est un rassemblement harmonieux sur scène, de dénonciation, de cogitation de haute voltige, d’assumation d’une existence maculée de subordination, d’insubordination, de révolte, de joie dans le vécu tout comme de la gratuité de sueur et de sang versés pendant des siècles de barbarie parce que la différence a toujours été une peur blanche.


Fort était ce haut le coeur avec à la pièce du Nina Simone, du Billie Hallyday, de Haïti Troubadour… où s’entrelaçaient des jurons et obscénités en créole et en anglais… 


Cabaret noir est un spectacle cru, tacheté de surprises, de jeux de dominos qui se construisent, se déconstruisent, se réinventent pour chanter la négritude ou mépriser cette peur dont l’autre s’est servie pour être monstre et demeurer monstre.


Gaspard Dorélien, MA

Ottawa